Quatrième de couverture:
« Corse en pendentif, santiags bleues et Mazda à toit ouvrant, à midi, Jean-Lou, lunettes noires, classe absolue, m’attendra devant le collège. »
Lycéennes effrontées ou fiancées romantiques, les jeunes filles de Claire Castillon ont un trait commun : les hommes dont elles tombent amoureuses sont plus âgés, voire bien plus âgés qu’elles. Sont-elles intrigantes ou ingénues ? Naïves ou rouées ? Les deux, sans doute. Mais ne nous y trompons pas : la cible que visent ces 21 nouvelles, ce sont avant tout ces « messieurs ». Leur légèreté est pathétique. Leur veulerie, inébranlable. À quelques exceptions près.
Suite de variations sur un thème classique, Les Messieurs sont autant de contes cruels, de brèves comédies. S’y dessinent les intermittences du désir masculin et les espoirs déçus des filles. Des histoires d’abandon, d’innocence et d’effroi comme seule en connaît l’adolescence, ce moment de fragilité extrême que Claire Castillon décrit admirablement.
Mon avis:
La nouvelle est un drôle de genre. Longtemps, je l’ai laissé au placard, jusqu’à ce qu’on apprenne à se connaître. Enfin, j’ai compris. La nouvelle ne se laisse pas avoir comme ça, elle n’est pas faite pour que le lecteur retrouve sa zone de confort, mais plutôt le bousculer.
Les jeunes filles de ces 21 nouvelles se ressemblent et se confondent. Elles ont toutes cette fragilité et cette entièreté qui caractérisent l’adolescence. Elles ne savent pas vraiment pourquoi elles tiennent à ces hommes – à ces vieux – qui parfois les dégoutent. Il faut dire que le portrait de ces « messieurs » n’est pas des plus avantageux. Mèche lustrée feignant de cacher une calvitie déjà bien installée, poils qui s’échappent des oreilles, mains de vieillards, alcoolique, seul… Les lieux et le temps s’effacent, laissant seulement place à ses passions étranges.
En lisant ce recueil, je me suis demandée qui étaient visés par la plume cinglante de Claire Castillon. Ces jeunes filles ou ces messieurs ? Y aurait-il un coupable d’ailleurs ?
Comme souvent dans les recueils de nouvelles, certaines sortent du lot. C’est pour ça que je dirai que les petites histoires de Claire Castillon ne se valent pas forcément, contrairement à son écriture. Ses mots m’ont tenu en haleine du début à la fin. Je ne saurai pas vraiment l’expliquer, mais il y a un côté totalement lucide et acerbe, et en même temps une autre facette plus naïve et ingénue, servant à merveille ses amours, ratés avant même qu’ils ne commencent.
Dérangeant et grinçant, donc, mais admirablement écrit.
La nouvelle que j’ai préférée : Le silence
Ma note: 4/5
« Je tiens à ce silence imposé dès le départ et qu’il rompt de temps à autre pour m’écrire des mots d’amour. Si tu m’écris encore, je t’interdis de me voir, l’ai-je un jour menacé, pour qu’il n’émette plus de preuves à charge […] Je demande le silence mais le temps passe et il ne parvient plus à le respecter. Il dit que les mots ne contiennent rien de mal avant de convenir qu’ils contiennent davantage que le lit que nous partageons en tremblant. »
« Je repars comme je suis venue, un peu pliée peut-être, à l’image de ma minibrosse à dents, de ma minibrosse à cheveux. J’appuie sur ma minitélécommande mentale pour éteindre ma miniflamme dans le coeur, et je marche jusqu’à ce que ma minipromenade se transforme en randonnée. »